Intoxication par un produit agricole ou industriel
Les produits agricoles et industriels peuvent provoquer des intoxications graves avec parfois un risque collectif ou un accès périlleux à la victime. L’identification des composés à partir des données de l’emballage (nom commercial, composition, références) en lien avec le Centre Antipoison, et les référents sur un site industriel, est fondamentale.
- P1.
- fonctions vitales (conscience, respiration)
- produit : nom, usage, pur ou dilué
- mode d’intoxication : ingestion, inhalation, contact cutané.
Ne pas faire vomir en cas d’ingestion.
Engagement immédiat d’un moyen secouriste équipé d’un défibrillateur et d’oxygène en cas de détresse vitale.
- évaluer les fonctions vitales.
- évaluer le danger spécifique au produit suspecté : la gravité de l’intoxication dépend de la toxicité et de la durée d’exposition au produit, prendre l’avis du Centre Antipoison, gravité particulière des produits caustiques ingérés, gravité des dérivés alcooliques.
- évaluer le risque toxique en fonction des produits suspectés, de la quantité maximale (ingestion, inhalation, contact), de l’heure probable d’intoxication, du caractère accidentel ou intentionnel suicidaire ; toujours choisir l’option la plus pessimiste.
- rechercher d’autres signes cliniques : troubles digestifs, troubles respiratoires, agitation, mouvements anormaux, troubles neurosensoriels, cyanose, douleur thoracique ou abdominale, hématémèse, brûlures cutanées ou muqueuses.
- se méfier d’une évaluation clinique rassurante malgré la prise potentielle d’un toxique à haut risque (cyanure, arsenic, chlore, acide fort, base forte, fluorures, pesticides, herbicides, insecticides…).
- évaluer un risque collectif.
- terrain majorant la gravité : âge (enfant, personne âgée), antécédents.
• R1 : en cas de détresse vitale, de produit toxique à haut risque, au moindre doute à la régulation ou sur recommandation du Centre Antipoison.
• R2 : en l’absence de signe de gravité, admission dans un service d’urgences selon les recommandations du Centre Antipoison (propres moyens, ambulance), engagement des sapeurs-pompiers notamment en milieu industriel (risque collectif, accès périlleux à la victime).
• En attendant l’arrivée des secours : mettre en position latérale de sécurité en cas de coma, collecter les emballages, identifier le produit en cause, laver la peau et les muqueuses à l’eau courante pendant au moins 15 minutes en cas de brûlures cutanées ou oculaires.
• En l’absence de nécessité d’envoi des secours : sans objet.
Compléter et valider les critères séméiologiques téléphoniques, mesurer les paramètres vitaux, identifier les produits incriminés, collecter les emballages.
Traitement symptomatique, antidotes ou traitement spécifique, recherche d’une complication (hypothermie, inhalation digestive, points de compression, ECG…).
• réanimation polyvalente ou spécialisée en toxicologie selon la présentation clinique et les données toxicologiques (ingestion de toxiques à haut risque vital) ou si un traitement spécifique a été mis en route.
• SU dans les cas sans critère de gravité.
• proximité d’un service de chirurgie thoracique en cas d’ingestion de caustique.
Intérêt d’une conversation à 3 entre le médecin régulateur, l’effecteur sur place et le Centre Antipoison.
Cf. la fiche Procédures dégradées générales
Toxicité de quelques produits agricoles ou industriels :
Insecticides :
• organochlorés (Lindane, Endosulfan) : après passage percutané, inhalation ou ingestion, toxicité neurologique (agitation, angoisse, désorientation, ataxie, convulsions, coma) et hyperexcitabilité myocardique ; traitement symptomatique.
• organophosphorés : anticholinestérasiques très toxiques et très utilisés ; après passage percutané, inhalation ou ingestion, syndrome muscarinique (myosis, hypersialorrhée, bradycardie, encombrement et dyspnée asthmatiforme), syndrome nicotinique (fasciculations, crampes musculaires, paralysies), confusion, convulsions, coma et troubles du rythme ; traitement symptomatique et spécifique : atropine à forte dose (2 mg/10 min QSP mydriase) et Contrathion® (antidote).
• carbamates : idem mais toxicité plus courte.
Rodenticides organiques :
• strychnine : 30 min après ingestion de l’ordre de 20 mg, hyperexcitabilité médullaire avec convulsions et contractures tétaniformes pouvant s’accompagner d’un arrêt respiratoire, rhabdomyolyse, pas de trouble de la conscience ; traitement symptomatique par benzodiazépines et curares.
• chloralose, crimidine : après ingestion de l’ordre de 1g, coma d’installation rapide, convulsions, myoclonies et hypersécrétions bronchiques ; traitement symptomatique par benzodiazépines et réanimation respiratoire.
Herbicides :
• paraquat (Gramoxone©, Speeder©, Pyriquat©, Tradiaquat©, Illico©, Giror©, Tota-Col©) : très utilisés et extrêmement toxiques (environ 60 morts annuelles en France), causticité digestive, puis vers la 24ème heure, insuffisance rénale aiguë et développement en 4 à 10 jours d’une fibrose pulmonaire létale ; vomitifs et adsorbants à domicile, traitement symptomatique.
• diquat (Reglex©, Reglone©) : même toxicité que le paraquat sans fibrose pulmonaire.
Produits industriels :
• cyanures : après inhalation ou ingestion, coma, cyanose et collapsus d’apparition rapide. Traitement symptomatique et antidote (Cyanokit®).
• fluorures : causticité comparable aux acides forts et hypocalcémies sévères :
lavage et traitement symptomatique.